Travailler
Tue
Yvan
Robin
Éditions
Lajouanie
Voici
le deuxième roman coup de poing que je viens de lire cet hiver sur
fond de réalisme social décapant. De White Trash de John King,
romancier anglais à Travailler Tue d'Yvan Robin, il n'y a qu'une
marche. Une marche de la descente vers les enfers ou celle qui vous
fait grimper jusqu'au burn-out. Ces deux marches semblent pourtant
être sur le même pallier.
Travailler
Tue en ce début 2016 résonne en bien des points dans notre
actualité au niveau social, économique et politique. C'est pourtant
une fiction pure sans allusion directe avec notre actualité, mais
nous ne pouvons nous empêcher de tracer des lignes parallèles avec
celle-ci.
Ici
Yvan Robin plante le décor dans des chantiers de travaux publics
avec ses incidents, accidents réalistes et toutes les procédures
sombres qui en découlent pour sauver les intérêts des financiers,
managers etc... Ici notre protagoniste, Hubert Garden, Inspecteur
Général de Sécurité au service Prévention des Risques de
l'entreprise V2V va se retrouver dans la dure tâche d'effacer les
empreintes, traces d'un tragique accident de chantier. Ses
compétences, sa conscience professionnelle vont l'amener sur le
chemin de l'irréparable en désignant des responsables de certains
dysfonctionnement pour ensuite se venger sur eux. De l'employé
exemplaire, consciencieux, méticuleux surgit une part sombre,
latente qui s'est nourrit de toutes les blessures de son enfance,
puis celles de son adolescence et enfin des choix par défaut faits
pour construire sa vie d'adulte.
Hubert
Garden est aussi un homme marié. Sa femme infirmière dans un
service de gérontologie semble aussi arriver à la limite du
supportable. Son envie d'enfant qui se traduit en une série
d'avortements successifs qu'elle assume de manière morbide dresse un
parallèle avec le cheminement que va prendre son mari.
Dans
ce roman oppressant, difficile de prendre une bonne bouffée d'air
entre la caravane, habitation provisoire du couple, les bureaux de
l'entreprise, la chambre du patient retord et l'esprit obscurci
d'Hubert. Pourtant sa femme entretien un jardin potager pour se
préserver de la folie, se préserver un petit coin de paradis qui
trouve aussi une résonance dans le nom marital de son mari,
« Garden ». Mais l'état d'esprit d'Hubert est loin de
respirer le paradis. Partout où il avancera, il sèmera la mort et y
prendra plaisir.
Cette
fiction pleine de noirceur et de suspense ne fait que refléter des questions
sociétales, les dysfonctionnements des grosses entreprises, les
prises de risque à tous niveaux et les engrenages dans lesquels les
employés se font broyer. Toutes ces évocations transparaissent au
fur et à mesure qu'Hubert évolue sans pour autant critiquer de
manière directe ces maux qui émergent de nos institutions et de
notre système capitaliste.
Du
réalisme social à fleur de peau !
Céline B.
Céline B.
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