Paysan
résistant !
de
Benoît Biteau
Chez Fayard
En général je cherche une
accroche pour parler d’un livre coup de cœur, mais ici le titre suffit
amplement. Commandé l’an dernier auprès de l’auteur lui-même, je l’ai reçu de
ses mains le jour de sa transhumance éco-solidaire en mai dernier, ouvrage donc
dédicacé par lui ainsi que sa compagne entièrement impliquée dans la vie et
gestion de la ferme.
Paysan résistant !
se place juste après Du courage ! d’Isabelle Saporta. Hasard ?
Coïncidence ? Non, car je n’y crois pas. Je crois aux synchronicités de
l’univers qui donnent justement du sens à nos vies.
Vite, j’ai lu le livre
car je voulais comprendre, savoir. Mais savoir quoi exactement ?
Campagnarde dans l’âme, j’ai été initiée dès ma tendre enfance à la cueillette
des champignons, j’accompagnais mes grands parents dans leurs champs, potagers.
J’ai connu les vendanges à la main jusqu’à l’âge de six ans avant que des
monstres mécanisés viennent gâcher ces moments partagés en famille, entre
voisins. Ainsi les repas de vendanges ont disparu pour laisser place à la
banalité du quotidien régit par qui, par quoi au fait ? Petite, j’aimais
m’élancer depuis le potager de mon père pour me jeter sur le dos dans un fossé
fleuri et admirer une multitude de papillons et insectes multicolores prendre
leur envol au-dessus de moi. Puis soudainement, plus rien. En même temps (ah ce
« en même temps » …) les haies de mûres qui encerclaient les prés des
vaches le long de la rivière avaient disparu. Les vaches aussi d’ailleurs. Les
sorbets de mûres, introuvables dans le congélateur. La sorbetière avait dû
commencer à rouiller. Le lait que je buvais le matin n’avait plus le même goût.
Normal, on ne me demandait plus de déposer le pot au lait chez les fermiers du
village à côté.
Les années ont passé. Les
champs de maïs ont envahi des espaces verts qui me permettaient l’accès à un
lieu sacré : les berges du cours d’eau de mon enfance. Les questions ont
commencé à surgir en lisant certains auteurs, en allant vivre dans d’autres
contrées rurales : Angleterre, Pays de Galles, Nièvre. Puis de retour dans
ma région, en retrouvant les odeurs de mon terroir, les bois que j’affectionne,
en me passionnant subitement pour les orchidées sauvages et en recherchant des
stations et en surveillant leur évolution ont renforcé mes convictions. Mon
regard s’est aiguisé, mes habitudes de consommation pour la nourriture aussi
ainsi que les liens entre les maladies et leurs réelles origines m’ont aussi
interrogé.
Ainsi la rencontre de
Benoît et son combat pour l’environnement, l’agriculture biologique n’ont pu me
laisser indifférente et m’ont surtout rassuré sur le fait que des hommes et des
femmes s’engagent pour promouvoir non pas un modèle possible, mais la solution
évidente, logique pour le bien commun de tous. Ce livre est à la portée de tous
pour comprendre les enjeux d'aujourd’hui et surtout pour quelles raisons et
quels sont les mécanismes, les rouages qui nous ont emmenés là où nous en
sommes. L’auteur vous explique par exemple quel type de semences utilisées,
l’importance de la présence des arbres sur les parcelles, les associations de
cultures, ce que peuvent apporter les plantes les unes aux autres, l’élevage
des races locales ainsi que les fonctions vitales d’un écosystème riche tant
dans ses qualités minérales qu’organiques. Il expose aussi la manière dont sa
ferme fonctionne, son histoire, son parcours d’homme, de combattant et
résistant entraînant avec lui sa famille qui l’aide et le soutien.
Les agriculteurs ou
plutôt paysans qui défendent une agriculture biologique respectueuse de
l’environnement et des consommateurs doivent être défendus et aidés. Ce sont
eux qui garantissent la santé d’une terre saine et nourricière et ainsi
préservent la nôtre. Les enjeux des cours d’eau sont également abordés, un
sujet jamais évoqué dans les médias et pourtant crucial pour notre avenir.
Beaucoup d’autres thèmes
sont abordés de manière simple, c’est-à-dire qu’il n’est nul besoin d’être
expert en agriculture productiviste, agrochimie, économie ou sur la PAC pour
comprendre les dysfonctionnements expliqués par l’auteur du livre.
J’aimerais citer quelques
phrases de l’ouvrage, mais chaque page révèle une vérité tellement criante sur
notre réalité et devenir, que je n’ai pas trouvé. Je cite donc quelques noms de
chapitres pour vous donner envie de le lire :
Chapitre 1 : Un
combat pour nous tous, paysans et citoyens
Chapitre 5 : Mon
parcours initiatique… et atypique…
Chapitre 9 : Ma
ferme : une expérimentation à ciel ouvert
Chapitre 19 : En
finir avec le désert des partages
Chapitre 23 :
Cultivons avec la nature, pas contre elle !
Pour finir, je remercie
l’auteur pour ce travail de qualité qui s’est ajouté à son labeur quotidien
ainsi qu’à ses responsabilités d’élu. Nous avons besoin de personnes comme lui
pour avancer comprendre, nous donner les clefs pour que de nouvelles portes
s’ouvrent sur un monde plus juste et plus sain.
Enfin je cultive le doux
espoir qu’un jour peut-être, les pieds dans l’eau, je rassemblerai mes deux
mains en carreaux pour qu’ils piquent de l’eau pour me désaltérer sans crainte
dans la rivière poissonneuse de mon cœur, le Trèfle.
Voici une vidéo de Brut sur laquelle il s'exprime:
C . Bertin